Visible durant tout l’hiver dans notre ciel, la célèbre nébuleuse d’Orion est illuminée par un jeune amas d’étoiles situé en son cœur ; il s’agit du Trapèze ou Thêta 1 Orion. Ce jeune amas se compose de 4 étoiles principales dont les trois premières, A, B et C ont été identifiées pour la première fois par Christian Huygens en 1656 et il a fallu attendre 1684 pour qu’il devine la composante D.
Si avec des magnitudes comprises entre 5,1 et 8,5 les 4 étoiles principales du trapèze sont assez brillantes, ce n’est pas le cas des autres étoiles du groupe qui affichent des magnitudes comprises entre 10,3 et 15,5. Ces autres étoiles étant visuellement beaucoup plus faibles, il fallut attendre 1826 pour que Wilhelm Struve découvre E puis 1832 et John Herschel pour l’étoile F. Alvan G. Clark repéra la composante G avec la lunette de 91 centimètres de l’observatoire de Lick en 1888 ; et finalement Barnard a observé et mesuré la faible paire HH’ en 1889 avec cette même lunette. A et B sont toutes deux des binaires à éclipse.
Nommée « la région de Huygens » en l’honneur de ce célèbre mathématicien et astronome qui a observé la nébuleuse pour la première fois, la région centrale de la nébuleuse est très brillante par rapport à la partie périphérique et elle apparait le plus souvent saturée sur les photographies numériques qu’elles soient prises avec un apn ou une ccd et des filtres rvb traditionnels. La solution pour voir les détails du cœur consiste à faire une série de poses courtes, typiquement d’environ 30 secondes puis d’incruster le résultat obtenu dans l’image pour déboucher la zone. Malheureusement, même avec des temps de pose aussi courts les étoiles principales du trapèze saturent le capteur et elles apparaissent trop grosses, empêchant de voir les composantes faibles.
La solution consiste à utiliser un capteur ccd et des filtres interférentiels à bande étroite (entre 5 et 6 nm de bande passante) dans les longueurs d’onde de l’hydrogène et de l’oxygène. Ces filtres ont la particularité de littéralement éteindre les étoiles du champ photographié ce qui permet de finalement laisser apparaitre les composantes faibles de l’amas.
J’ai donc essayé un premier jeu de captures de 60 x 10 secondes soit un temps de pose cumulé de 10 minutes avec un apn canon 400D placé au foyer du télescope ASA de 30 cm de diamètre de Pierre Ponsard à la Fosse le 17/01/16. Ce télescope est très ouvert (lumineux) avec un rapport F/D de 3,6 et une focale de 1080 mm mais le résultat n’est pas bon car le trapèze est déjà trop exposé.
J’ai réessayé cette fois avec la camera ccd et les filtres Ha et OIII au foyer du C11 de 28 cm avec le réducteur de focale, ce qui donne un rapport F/D de 6,8 pour une focale de 1760 mm et le résultat est cette fois plus convaincant puisque les composantes faibles apparaissent. Malheureusement, comme je l’ai dit plus haut, ces filtres éteignent les étoiles et elles restent donc faibles malgré l’utilisation d’un jeu de 40 poses de 15 secondes en Ha combinées à un jeu de 60 poses de 15 secondes en OIII capturées depuis La Fosse le 01/03/16 pour un temps de pose total cumulé de 40 minutes par duplication de l’image OIII de façon à créer les couches verte et bleue nécessaires à la composition couleurs.
ci-dessus à gauche, un crop de l'image faite au 400d redimensionnée à 140% et à droite l'image faite avec la ccd et les filtres Ha et OIII
et ci-dessous un crop annoté:
J-Luc